Elle n'arrive pas à résister. Lutter contre soi-même n'est pas une mince affaire. Un démon vit en elle, ne se lassant jamais de poignarder la jeune femme, de l'intérieur, la forçant à lui ouvrir la porte. Le seul moyen de résister est d'y céder. Cette citation d'Oscar Wilde lui permet de survivre, même si ce n'est pas elle qui a le contrôle de son corps. Pourtant, Pandora est une invention, un être tout droit sorti de l'imagination d'Héléna. C'est la partie sombre de cette dernière. Le côté noir, l'opposé de ce que la danseuse est. Plus jeune, Héléna a été craintive, timide, avec un certain manque d'assurance. Quant à Pandora c'est l'opposé, contrairement à Éden qui n'est que la personnalité qu'a voulu l'enfant, ce qu'elle a voulu être. Vivre à trois dans un seul corps est une chose presque impossible mais eux, ils l'ont fait. Mais, en ce moment, la personnalité dominante est Pandora. La criminalité de Gotham n'a pas calmé ce monstre enragé. Elle veut participer à la mise à mort de la ville et Héléna la laisse sortir, n'importe quand. Le traitement arrive, pourtant, à canaliser Pandora, laissant Héléna en paix... Enfin, avec la voix d'Eden en fond. Cette schizophrénie rappelle notre amie le ventriloque. On pourrait alors dire que la marionnette est Pandora et le ventriloque, Héléna. Sauf que l'hôte est l'enjeu de l'affrontement qui se déroule. Héléna a, cependant, une solution contre cette folie qui la ronge lentement. Une passion : la danse. Un art de rue qu'elle travaille depuis des années. Le seul remède contre sa folie destructrice. Lorsque la musique commence, les premiers pas exécutés, elle se sent elle même. Et ça, c'est un moyen infaillible contre l'envahisseur. La jeune femme glisse presque sur le sol, au rythme de la musique.

C'est ce qu'elle fait, cette nuit là. La musique résonne dans l'entrepôt abandonné, étouffant les bruits des pas de danse. Héléna ne pense à rien. Juste à laisser son corps bouger au son de la mélodie. Seule la musique est entendue par Héléna. Pas les mouvements à l'extérieur du bâtiment. Les basses font vibrer les murs du bâtiment. La jeune femme se laisse aller, entraîner par les accords, le tempo. Héléna a revêtit un pantalon de jogging gris, un débardeur blanc et un sweat à capuche noir. Les semelles de ses baskets noires frappent le sol, pour marquer le rythme. Son apparence et son attitude montrent qu'elle compte sortir. Prendre l'air, se promener, est une action à faire pour être tranquille pendant quelques petites heures. Ses cheveux flottent autour d'elle, suivant les mouvements du corps. Dehors, des silhouettes traversent la nuit, encadrant le bâtiment. Leurs déplacements se font sans aucun bruit. Certains montent sur le toit, furtivement. D'autres se postent à chaque fenêtre. Chacun tient dans leurs mains des armes contondantes. Des signes de mains, des gestes. Quant à Héléna, elle continue de se déhancher. Cependant, son visage exprime le doute, une expression qui prouve qu'elle est en pleine réflexion, qu'elle se doute de quelque chose. Le rythme accélère, la respiration devenant plus rapide. Son souffle est audible. Les pas de danse se font plus rapides, plus souples mais aussi plus brutaux. La température augmente puis la musique prend fin.

Les vitres volent en éclats, les morceaux se dispersant dans les airs. Une dizaine d'hommes pénètre à l'intérieur, les lumières des viseurs braqués sur Héléna. Des voix animent la scène, criant, chuchotant. Pandora apparaît, provoquant une sorte d'onde autour d'elle. Le virus est en action dans son sang. Son pouls prend un vitesse folle, ainsi que la circulation de son sang. Elle sent ses forces se décupler. Le toit se brise dans un bruit d'explosion, les débris tombant sur le sol. D'autres hommes descendent en rappel. Un d'entre eux lui tombe dessus. Le réflexe de Pandora est de l'attraper par la jambe et de l'envoyer à l'autre bout de l'entrepôt. Un cri rauque se diffuse tandis qu'un jet de sang s'échappe de la bouche de la victime, atterrissant sur le mur ferreux du bâtiment. Le regard noir de la belle se pose sur chaque être présent autour d'elle. La vague de haine qu'elle émet en fait reculer quelques uns. D'autres maintiennent leur position, prêt à bondir. Un bruit de détonation. La douleur ne surprend pas immédiatement. Un impact impressionnant se dessine sur la hanche de Pandora. Cette dernière ne ressent encore rien. La suite se passe alors, très vite. Elle se rue sur le tireur, les tirs fusant dans tous les sens. Un craquement d'os nous explique très vite le sort du tireur. Le choc de chaque balle résonne comme un risque de mourir pour la jeune femme. Elle court jusqu'à la grande porte, se battant avec une rage étonnante. Les deux hommes, qui lui font face, sont sauvagement tué. L'un est transpercé par les balles de l'armes de son coéquipier, et ce dernier meurt, la carotide déchirée. Le sang coule le long de la mâchoire de Pandora. Elle se prépare à courir vite et à une course poursuite dans les rues de Gotham.

À peine elle pose les pieds à l'extérieur qu'une armée de soldats la tiennent pour cible. Un sourire sadique s'affiche légèrement sur les lèvres de la jeune femme. Elle passe ses bras derrière la tête, ses yeux scrutant les environs. Un, deux... Trois, quatre, cinq... Dix, onze. Elle ne peut pas se battre contre eux. En comptant ceux encore à l'intérieur, ils sont presque une vingtaine. Pandora soupire, haussant les épaules. Un des militaires l'approche, posant son flingue sur sa tempe. Il n'a que le temps de faire ce geste, qu'il se retrouve le bras brisé, plié dans son dos, sa propre arme prête à lui tirer dans le crâne. Un ricanement sort d'entre les lèvres de Pandora. Elle sait pertinemment que les autres n'agissent pas si un d'entre eux est aux mains de la cible. Mais, elle veut jouer. Elle appui sur la détente, un flot de sang aspergeant son public. L'orchestre reprit. Elle détale au quart de tour, se baissant pour éviter les balles. Elle sait où aller, où fuir. Elle doit seulement tenir plus de cinq minutes avec vingt hommes armés jusqu'aux dents. Elle court jusqu'aux conteneurs du port, s'engageant dans un labyrinthe sans fin dans lequel, elle peut y rester. Les bruits de pas de ses poursuivants lui sont plus bruyants. Des paroles, des ordres. Finalement, sortir de cet endroit n'est pas si difficile. Dans la nuit noir, elle ne suit que son instinct, se faufilant entre chaque bloc de ferraille, se concentrant sur les bruits de pas et les voix. Elle parvient enfin à la fin de cet horrible labyrinthe. Cependant, mauvaise surprise, on l'attend. Dernière chose à faire... Pandora prend son élan et traverse le petit groupe armé, les faisant tomber, en blessant certains, puis saute à l'eau...

Les balles l'effleurent, créant de faibles blessures sur ses membres. Il faut qu'elle tienne dans la baie de Gotham quelques temps, juste le temps qu'on la laisse de nouveau tranquille. Son corps trempé, la respiration haletante, elle patiente, attendant que les bruits diminuent, faiblissent. Elle nage, sous l'eau, tentant de se faire la plus discrète possible, jusqu'à l'autre bout du port. Durant cette attente, elle réfléchit, repensant à ce qu'elle a fait. Tuer. Encore et encore. Quelle joie pour Pandora. Pour Héléna,quelques victimes de plus dans le chef d'accusation. Le jour où elle se fait attraper, elle vivra dans le noir le plus complet, loin du monde, jusqu'à la fin des ces jours. Sauf si quelqu'un la sauve derechef, bien sûr. Elle ne peut pas trop compter là dessus. Elle a, tout de même, tué ceux qui l'ont sorti de cet établissement de fous. Les besoins sanguinaires de Pandora ont été dur à contrôler. Bref, une victime de plus ou de moins, aujourd'hui, cela ne changera rien à la peine qu'elle va subir lors de son emprisonnement, si ils arrivent déjà à l'attraper. Il faut qu'elle rentre un peu plus dans la criminalité de Gotham, qu'elle côtoie les plus grands si elle veut survivre. Mais en attendant, Pandora doit trouver un nouveau logis et établir un plan. Elle se concentre et aucun bruit ne lui parvient. Il est temps de rentrer... Nul part.

Les gouttes tombent sur le sol dans un faible clapotis, régulier. Tremblante et mouillée jusqu'aux os, elle chercher désespérément un nouvel endroit où s'installer. La noirceur des rues de Gotham donne tout de même des frissons. Personne ne peut prévoir ce qui va s'y passer si on y entre. Des fois, des personnes reviennent à la vie quotidienne, quant à d'autres, jamais on ne les revoit. Pandora n'a pas peur. Elle sait se battre, sent les gens, arrive même à en effrayer. Peu de lumière éclaire son chemin, quelque coups de feu résonnant au loin, des poubelles prenant feu pour réchauffer les clochards s'attroupant autour. Là, un bâtiment vide depuis peu de temps. Un couple se serait entre tué, tuant au passage les voisins. Histoire joyeuse, n'est ce pas ? Vivre dans un lieu qui a servi de scène de crime, pas de soucis. La jeune femme emprunte les escaliers extérieurs, regardant à travers chaque vitre pour détecter un quelconque signe de vie. Rien. Elle s'infiltre au dernier étage. L'appartement est encore en bon état. Suffisant pour vivre en attendant de trouver quelque chose d'autre. Un long soupir fuit la bouche de Pandora qui s'installe sur le lit. De sa poche trempée, elle sort un paquet de cigarette d'où elle sort un de ces longs tubes de tabac. La coinçant entre ses lèvres, elle l'allume, fermant les yeux. Le temps de jouer est passé. Il est temps de passer aux choses sérieuses.